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Un monde sous l'eau : ce que les inondations meurtrières et coûteuses signifient pour l'avenir
À l'ère du changement climatique, les inondations posent des questions difficiles sur notre mode de vie, la façon dont nous concevons nos villes et l'environnement bâti. Nous explorons quatre idées qui pourraient influencer notre réflexion future sur les inondations.
L'été 2021 a été marqué par des inondations d'une ampleur sans précédent dans le monde entier. En juillet, en Allemagne et en Belgique, plus de 200 personnes sont mortes et des centaines d'autres ont été blessées à la suite de pluies torrentielles qui ont déversé sur les villes des précipitations record.
Dans toute l'Europe, des milliers de maisons ont été détruites, leurs occupants et les communautés ont été traumatisés. Une brève consultation du site web FloodList indique que ces inondations estivales intenses se sont produites partout, des États-Unis à l'Italie, de la Chine à l'Inde et au Bangladesh - une autre "nouvelle normalité" difficile à laquelle nous devons répondre.
À l'ère du changement climatique, les inondations posent des questions de plus en plus difficiles sur notre mode de vie, la façon dont nous concevons nos villes et l'environnement bâti dont nous dépendons. Nous avons vu à quel point la civilisation est fragile et que, dans les pays pauvres comme dans les pays riches, il existe de nombreuses vulnérabilités imprévues face à la puissance et à la régularité croissantes des inondations. Comme le montre l'expérience récente de l'Europe du Nord, même avec des services de prévision météorologique compétents et bien financés comme le Système européen d'alerte aux inondations, les effets seront dévastateurs si des adaptations bien planifiées ne sont pas mises en place.
Il n'y a pas de réponse facile au problème croissant des inondations, mais voici quatre idées qui devraient orienter notre réflexion et notre prise de décision à l'avenir.
1. Prendre en compte et modéliser les impacts futurs dès maintenant
Les effets de la hausse des températures moyennes sur l'augmentation de l'humidité dans l'air sont bien connus. En ce qui concerne le changement climatique, les scénarios probables ne sont que trop clairs. Les réalités émergentes des tempêtes extrêmes, des précipitations, de l'élévation du niveau de la mer et des températures sont conformes aux modèles du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. Même si l'on parvient à stopper les émissions deCO2, il faudra des décennies pour que nos systèmes météorologiques mondiaux atteignent un nouvel équilibre et il faudra continuer à mettre en œuvre des mesures d'atténuation réalisables.
Au niveau local et régional, il est urgent de définir l'ampleur de la menace afin de pouvoir utiliser ces modèles pour identifier et établir les risques et les vulnérabilités au niveau local. Cette compréhension de base existe dans certains endroits, mais pas dans d'autres. Nous avons produit une cartographie numérique de Bahreïn pour illustrer les implications des futures hausses potentielles du niveau de la mer d'ici 2050 et 2100, ainsi que leur impact probable sur l'environnement bâti et les infrastructures du pays. Les outils numériques s'avèrent inestimables dans cet effort d'analyse à l'échelle nationale.
2. Les forces de la nature ne peuvent pas être combattues de front
Face à une menace naturelle multiforme comme les inondations, la meilleure stratégie consiste à trouver un compromis avec la nature, sans tenter d'ériger des barrières de plus en plus hautes ou de s'appuyer sur des infrastructures physiques de plus en plus nombreuses. Lorsque les inondations sont dues à de fortes précipitations, il faut ralentir l'écoulement de l'eau vers l'intérieur des terres, prévoir un stockage transitoire dans le paysage et faire de la place pour que les plaines d'inondation puissent fonctionner correctement ; les inondations causées par la mer et le débordement des vagues peuvent être gérées par des fronts de mer conçus pour absorber l'énergie excédentaire.
En termes plus généraux, chaque décision d'aménagement du territoire devrait également "faire de la place pour l'eau". Nous reconnaissons également la nécessité de placer les nouveaux développements à des niveaux plus élevés, plus loin des rivières, en prévoyant que le niveau des mers et des rivières continuera à augmenter. Les recherches montrent que la proximité des espaces ouverts et de l'eau est extrêmement bénéfique pour la santé, tant sur le plan du bien-être physique qu'émotionnel. Un défi supplémentaire consiste donc à trouver des moyens harmonieux de maintenir cette connexion, sans mettre les bâtiments et les vies en danger.
3. Les interventions efficaces tiennent compte de l'ensemble du réseau hydrographique
Toute personne travaillant dans le secteur de l'eau vous dira qu'il est toujours préférable d'essayer de ralentir et de gérer les inondations au plus près des collines et des bassins versants où elles se produisent. Cela fait partie d'une approche du cycle de l'eau dans son ensemble, qui reconnaît que l'eau doit continuer à se déplacer dans le paysage, tant naturel que bâti. L'amélioration de la résistance aux sécheresses et au stress hydrique va de pair avec la réduction des effets néfastes des inondations. Cela signifie qu'il ne faut pas compter sur des barrières de protection contre les inondations en béton et en acier pour renvoyer l'eau vers l'océan et assécher des terres agricoles vitales, par exemple. Cela signifie qu'il ne faut pas abattre trop d'arbres et endommager la nature pour atteindre d'autres objectifs productifs à court terme. Cette approche a évidemment des implications pour certaines des pratiques agricoles intensives que nous utilisons actuellement.
Un projet d'atténuation des inondations que nous avons conçu pour Skipton, dans les Yorkshire Dales, incarne cette philosophie. La ville était confrontée à un risque d'inondation régulier, mais dans un domaine public historique et naturel aussi étonnant, il était important qu'aucune solution ne nuise à ces caractéristiques. Nous avons proposé d'utiliser des barrages en dehors de la ville pour maintenir les eaux d'inondation plus près de l'endroit où la pluie tombe, en les stockant efficacement dans le paysage. Ce système de stockage des eaux de crue permettra d'éloigner 130 millions de litres d'eau de la ville, avant de les relâcher lentement dans les rivières locales une fois que le risque d'inondation se sera éloigné.
4. Identifier les vulnérabilités (et adapter votre réponse)
Les inondations sont un problème unique dont les manifestations sont infinies. Les solutions impliquent une réflexion large et flexible et doivent donc souvent être adaptées à un endroit particulier. À la suite des inondations causées par l'ouragan Sandy, l'Arup a été chargé d'aider le système de métro de New York à s'adapter et à éviter de nouvelles inondations. Notre solution comprenait l'installation de barrières autour de centaines de points d'accès et de ventilation qui étaient clairement vulnérables à l'eau provenant d'une rivière Hudson en crue. Les adaptations comprenaient un aménagement paysager cosmétique pour éviter de produire un système de transport visiblement défini par des défenses.
Dans les petites et grandes villes du monde entier, il y aura des milliers de passages souterrains, de tunnels et de caniveaux qui font partie du tissu urbain et qui nécessiteront des interventions individuelles sur mesure. Le travail d'identification de ces vulnérabilités aux inondations ne peut commencer assez tôt.
Bien entendu, s'agissant d'un problème mondial, nous pouvons partager les leçons tirées au niveau international. Le gouvernement de Singapour exige désormais que chaque point d'entrée dans le système de métro de la ville soit au moins un mètre plus haut que le sol, afin d'éviter l'inondation du réseau de transport - tirant ainsi une leçon claire de l'expérience de New York. Notre travail actuel de planification du drainage à Shanghai adopte une approche de "conception avec l'eau" qui combine des interventions basées sur la nature avec l'infrastructure "grise" traditionnelle.
Assez soudainement, les inondations révèlent les investissements et les adaptations qu'une ville n'a pas encore réalisés, ainsi que la qualité du développement et de l'entretien de sa protection contre les inondations. À mesure que nous progressons, il est clair que chaque pays aura besoin de régimes d'inspection pour tester, entretenir et garantir l'efficacité des moyens de défense contre les inondations face à cette menace croissante.
Investir dans l'avenir
Il n'y a pas de réponse facile aux risques d'inondation, mais il est clair que nous devons savoir à quoi nous attendre à l'aube du XXIe siècle. À l'instar du défi que représente la chaleur extrême pour les environnements urbains, nous devons accélérer le processus d'adaptation, en ayant une idée claire des risques qui nous attendent si nous n'en faisons pas assez.
